Strava est surtout connu dans l’univers du sport pour sa capacité à analyser des performances, comparer des segments et suivre l’évolution de l’entraînement. Initialement adopté par des coureurs et des cyclistes cherchant à optimiser leurs performances, l’application a déjà séduit plus de 100 millions d’utilisateurs dans le monde, selon TechCrunch. Dans la sphère urbaine, la question est de savoir si cet outil est vraiment adapté pour qui souhaite simplement se déplacer en ville, sans nécessairement viser un record de vitesse.
Les grandes métropoles, comme Paris, Londres ou New York, encouragent de plus en plus les déplacements à vélo. Selon le rapport "Évolutions de la pratique du vélo en France" publié par Vélo & Territoires, la fréquentation cyclable a bondi de 28% entre 2019 et 2022 en France. Cette tendance amène de nouveaux cyclistes, parfois moins sportifs, à se demander si l’application la plus plébiscitée par les amateurs de performance leur sera utile au quotidien. Observer son temps de trajet, partager son itinéraire, trouver des points d’intérêt : autant de fonctions qui, sur le papier, pourraient s’avérer pertinentes.
Certains cyclistes urbains utilisent effectivement Strava pour suivre leurs déplacements, générer des statistiques de kilométrage, et bénéficier de la dimension sociale de l’application. D’autres, en revanche, s’interrogent sur la pertinence d’un instrument initialement taillé pour des courses ou des sorties longues distance. Cette analyse vise donc à clarifier l’adaptabilité de Strava pour vos allers-retours quotidiens, et ce qu’il est possible d’en tirer.
Strava se présente comme un carnet d’entraînement interactif : l’app enregistre la distance parcourue, le temps, la vitesse moyenne, voire la fréquence cardiaque si l’on dispose d’un capteur compatible. Avec son concept de "segments", il compare vos performances à celles d’autres utilisateurs sur des portions de route ou de piste récurrentes. Pour la ville, il peut s’agir de certaines rues incontournables que les habitants empruntent régulièrement. En théorie, cela peut motiver à améliorer ses temps et repères, même en environnement urbain.
Au-delà des données de performances, Strava brille par la création d’un sentiment de communauté. Les utilisateurs peuvent s’abonner aux activités d’autres cyclistes, liker ou commenter leurs sorties, et ainsi découvrir de nouveaux itinéraires souvent jalonnés de bonnes adresses. Cette dimension sociale, qui repose sur l’échange et la comparaison, a fait exploser la popularité de l’application ces dernières années.
Dans un contexte de trajets urbains, cette communauté offre une mine d’informations sur des itinéraires alternatifs, le niveau de difficulté de certains tronçons, tout en permettant de rester connecté à d’autres passionnés de la petite reine. S’il n’est pas toujours question de faire exploser ses records de vitesse quand on se rend au bureau, partager son activité peut créer de l’émulation et inciter à rouler plus souvent.
Même si Strava a été conçu pour un usage sportif, de nombreux cyclistes urbains y trouvent leur compte. Pour certaines personnes, la notion de "performance" ne se limite pas à la vitesse, mais inclut le fait de mesurer combien de kilomètres on a parcouru dans la semaine, ou combien de temps on gagne par rapport à d’autres modes de transport. Dans ces cas, Strava devient un allié pour évaluer sa progression et se convaincre de laisser la voiture au garage.
L’une des grandes forces de Strava réside dans la clarté de ses statistiques. L’application compile vos temps de parcours, votre vitesse moyenne, la fréquence de vos sorties par semaine ou par mois. Pour quelqu’un qui cherche à implanter durablement le vélo dans son mode de vie, suivre ces données peut aider à visualiser les bénéfices concrets de ce moyen de transport. Voir s’accumuler les kilomètres parcourus sur Strava est parfois très gratifiant : on réalise la distance totale avalée en un mois de trajets quotidiens, et cela peut se transformer en défi personnel.
Strava est également reconnu pour son "Route Builder" (en version web ou via l’abonnement payant). Sur le papier, c’est un outil pratique pour découvrir de nouveaux axes, éviter les carrefours trop encombrés et même repérer des pistes cyclables moins fréquentées. En zone très dense, cette fonction peut s’avérer intéressante pour trouver des raccourcis ou des voies plus sûres. Cependant, il faut parfois se montrer prudent, car certaines suggestions peuvent plus refléter les préférences des sportifs (recherche de dénivelé ou segments populaires) que les besoins d’un navetteur urbain en quête de fluidité. Mais en combinant un œil critique et d’autres sources (comme OpenStreetMap ou un site d’informations locales sur la cyclabilité), on peut tirer parti de l’outil pour varier ses trajets.
Les adeptes de gadgets high-tech et de cyclisme urbain aiment souvent disposer de compteurs ou de montres connectées. Strava s’intègre parfaitement avec de nombreuses marques (Garmin, Wahoo, Polar, etc.), permettant un enregistrement automatique des sorties. Cette synchronisation rend le suivi presque instantané : on monte sur son vélo, on pédale, puis en fin de trajet, les données sont déjà chargées sur Strava pour être analysées ou partagées. Cet écosystème très complet séduit autant les cyclistes sportifs que les cyclistes urbains plus technophiles.
Malgré ces avantages, Strava reste axé sur l’aspect "performance" et s’adresse en priorité à des sportifs en quête d’exploits, ou du moins motivés par l’idée de progresser. Les trajets urbains au quotidien, souvent ponctués de feux rouges, d’embouteillages et de piétons, ne se prêtent pas toujours à la compétition ou à la recherche de records personnels. Voici quelques axes qui montrent pourquoi il faut réfléchir avant de tout miser sur cette application :
De plus, sur un trajet domicile-travail de quelques kilomètres, le gain d’informations objectives n’est pas toujours déterminant. On sait intuitivement combien de temps on met, puisqu’on emprunte le même chemin chaque jour. Les feux rouges et la météo peuvent par ailleurs influencer grandement le temps de déplacement, ce qui rend l’analyse de performance moins utile pour un usage purement utilitaire.
Il existe cependant plusieurs astuces permettant de tirer le meilleur de Strava dans un contexte urbain. L’essentiel est d’adapter l’outil à ses propres besoins, plutôt que de se conformer à la vision "sportive" traditionnelle. Quelques pistes :
En ajustant ces paramètres, tout en gardant de la souplesse quant à l’interprétation des données, on peut profiter de Strava pour enrichir ses trajets urbains. Toutefois, il n’existe pas de recette miracle : chacun doit évaluer si l’ajout de cette couche d’analyse rend le déplacement plus efficace ou plus contraignant.
Pour optimiser ses déplacements en ville, il existe d’autres applications plus spécialisées dans la cartographie ou l’information trafic en temps réel, telles que Geovelo, Citymapper ou Bikemap. Certaines sont plus orientées sur les itinéraires sécurisés, d’autres sur la multimodalité (combiner vélo et transport en commun). Strava n’a pas vocation à fournir en direct l’état du trafic ou les éventuelles perturbations des pistes cyclables.
En réalité, il peut être intéressant de combiner Strava avec ces autres solutions. Utiliser Geovelo ou Citymapper pour planifier l’itinéraire, puis laisser Strava enregistrer le trajet afin d’observer des statistiques d’ensemble. Beaucoup de cyclistes urbains adoptent cette approche pour profiter du meilleur des deux mondes : d’un côté un guidage en temps réel orienté sécurité, de l’autre un suivi plus social et algorithmique, pour s’amuser à découvrir combien de kilomètres on accumule sur une année.
Cette complémentarité se joue également au niveau de la communauté. Les applications ciblées "urbaines" peuvent manquer d’utilisateurs actifs avec qui échanger. À l’inverse, Strava regorge de cyclistes, même si une partie d’entre eux sont parfois plus sportifs que navetteurs du quotidien. Il y a donc une forme d’équilibre à trouver selon ses préférences, le type de sorties et la finalité recherchée dans cette utilisation d’outils numériques.
Les usages de Strava évoluent, au même titre que la pratique du vélo en milieu urbain. On observe déjà que l’application propose ponctuellement des challenges et événements dédiés aux "commuters", encourageant à accumuler des kilomètres sur des segments urbains. De leur côté, les villes nouent parfois des partenariats avec Strava pour mieux comprendre certains flux de circulation et adapter leurs infrastructures. Les données anonymisées contribuent à identifier les zones les plus empruntées ou, au contraire, délaissées.
Dans un contexte où de plus en plus de cyclistes optent pour des trajets quotidiens à vélo, Strava peut répondre à des objectifs de motivation, de découverte et de suivi statistique. Cependant, pour un usage urbain strictement fonctionnel, une app de navigation ciblée ou une carte papier peuvent parfois se montrer tout aussi pertinentes. Cette évolution constante de l’outil, entre plateforme d’entraînement et application plus généraliste, laisse entrevoir une plus grande adaptabilité de Strava à l’avenir.
En fin de compte, il appartient à chacun de déterminer si l’apport de Strava correspond à ses attentes. Les amateurs de suivi de données y trouveront leur compte, tandis que ceux qui souhaitent simplement un calcul d’itinéraire rapide s’orienteront peut-être vers d’autres solutions. L’important est de s’équiper d’un outil ou d’une combinaison d’outils qui rendent le déplacement à vélo en ville plus pertinent, plus sûr et plus agréable.